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Bon Arrien
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24 décembre 2003

Ce jour là, un lundi, je m'étais levé tôt. Je

Ce jour là, un lundi, je m'étais levé tôt. Je partais en train pour Clermont-Ferrand. D'habitude quand je prends le train en partance de Paris, je suis obligé de remonter l'interminable quaie pour trouver le wagon où mon assistante m'a réservé une place. Pour une fois, ce ne fut pas le cas, j'étais dans le dernier wagon du train, donc le premier du quaie. Je me suis installé dans l'interminable ennui de l'attente du départ : quinze minutes qui devaient me tuer.

Je regardais par la fenêtre d'autres voyageurs qui se précipitaient dans un autre train. Et là, au dernier wagon de cet autre train, un couple s'afférait devant la porte. Lui, grand brun, portait un sac de voyage sur une épaule et toussait toute les quinze secondes. Elle, de taille moyenne, brune, venait visiblement l'accompagner au départ. Je n'entendais rien, je ne pouvais que voir ce qu'ils faisaient et ils m'intriguaient. Ils restaient toujours soigneusement en face l'un de l'autre à distance rigoureusement constante, à porter pour toucher l'autre mais ils ne se toucheront pas. Quand l'un reculait, l'autre avançait et inversement. Ils pouvaient aussi tourner dans un sens ou dans l'autre. Mais cette danse sentait la tension. Ils se parlaient sans élever la voix par des phrases courtes et sèches.

Comme pour casser le rythme, lui, monta dans le train trouver sa place. Elle, elle lui tourna le dos et commençait à s'éloigner d'un air décidé en remontant le long de la locomotive. Elle fit quelques mètres et, par une soudaine impulsion, se précipita le retrouver. Ils descendirent ensemble sur le quaie recommencer leur danse d'attraction-répulsion. Cette fois, leurs échanges étaient d'un ton plus élevé. Machinalement, il sortie une cigarette de sa poche, s'avança sur le quaie pour demander au chef de gare du feu, pendant qu'elle le regardait faire. Pour la première fois, je pu la voir de face. Elle montrait une détresse qui me fit mal : cette scène était une rupture.

Ils reprirent leur dialogue éttouffant. Il aspirait sans cesse sur sa cigarette pour immédiatement avoir une quinte de toux. Par de grands gestes, il parlait de lui, disant avec ses mains que ce n'est pas sa faute. La paume en avant, sans la toucher, il lui signifiait qu'il la repoussait. Elle n'en pouvait plus, elle se mit à pleurer se cachant dans ses mains. De sa hauteur, il entama un monologue qui devait achever sa victime déjà à terre. Elle eu un dernier regard suppliant. Je voulais me lever... Mon train commençait à avancer. Bientôt elle disparu de mon regard.

Je croyais être endurçis, et pourtant... Je n'ai cessé de penser à cette scène depuis. Je me demande ce que j'aurais fait et qu'est ce qui se serait passé si mon train n'était pas parti à ce moment si violent. Car c'est bien cette violence qui me hante. En musique (classique), nous savons d'instinct quand le morceau se termine. Nous ressentons a ce moment la résolution des émotions qui sont nées au cours du mouvement et nous nous en sentons satisfait. L'émotion la plus proche de ce que j'ai ressentis, est celle d'une pièce de musique inconnue brutalement interrompue (comme la dernière oeuvre de Bach). Une insatisfaction qui laisse les choses en l'état, non résolues, injustement non résolues...

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